Dernière les paillettes et une certaine superficialité de Cannes, derrière ces plages désormais à l’effigie de L’Oreal, Magnum ou Schweppes, derrière les roof tops du Martinez, du 3.14, du Carlton et autres, derrière les soirées réservées aux Super Happy Few dans des villas plus que privées, nous nous sommes demandées si le Cinéma était utile. Si au-delà du marché du film, de la production, de la distribution, de la promotion, du merchandising, et de tous ses débouchés, le Festival avait une fonction sociale ?

Il suffit de penser à Robert Guédiguian , à Ken Loach, aux frères Dardenn et à tant d’autres qui filment l’infilmable, le non glamour, l’anti fantasme absolu. Eux se contentent de regarder les gens, les vrais gens avec leurs fêlures, leur quotidien passable, leurs problèmes de tous les jours, leur manque d’argent, leur manque de boulot, leurs maladies, leurs burnout, leurs découverts, leurs peurs du présent et du futur.

Dans “Sorry We Missed You”, en lice pour la Palme d’or, Ken Loach met en scène un père de famille britannique confronté à la précarité du marché du travail. Une œuvre sobre et engagée qui a fait l’unanimité auprès des festivaliers. Et que son auteur a défendu avec la passion qui le caractérise.

Bref, ces réalisateurs sont parfois gênants, parfois irritants mais toujours utiles. Ils nous forcent à garder les yeux ouverts là où l’on peut aisément perdre pied dans la easy life, le easy wearing avec des showrooms pour nous habiller sans avoir à débourser le moindre penny, la easy beauty avec des endroits où l’on va nous maquiller et nous coiffer sans frais, le easy eating, easy drinking, easy going….Tout est Easy ! Free And Easy ! No Worries : chacun joue son rôle !

Même si les marques de luxe se sont étalées, sans complexe, sur la Croisette en faisant valoir leur suprême égémonie, ne nous y trompons pas.

Elles ont une vraie utilité en ce qu’elles permettent à des réalisateurs engagés d’exprimer les ressentiments et les colères d’une société ultra matérialiste qui, trop souvent, piétine les valeurs essentielles de la vie !

Alors , deux secondes, on arrête les selfies et le selfish et on regarde juste passer les gens ! On les observe dans leur réalité et leur complexité. On filme pour témoigner et raconter la story des gens ordinaires.

Ne vous y trompez pas. Ce cinéma là, social et dérangeant, a sa place pleine et entière à Cannes. Il est même chouchouté par des marques de plus en plus responsables.

Alors Moteur ! On tourne !